Light of my life
Light of my life est un film américain réalisé par Casey Affleck. En artisan inquiet, Casey Affleck propose une errance apocalyptique sur fond d’introspection. Touchant, incisif et parfois dérangeant, son premier long-métrage de fiction impressionne la rétine.
Dans un futur proche, alors qu’un virus a décimé la population féminine, un homme (Casey Affleck) tente de protéger sa fille (Anna Pniowsky), miraculeusement épargnée. Toujours en mouvement afin d’éviter tant que possible de croiser d’autres hommes, dans un monde abandonné à la violence et aux instincts primaires, ce père va tout faire pour trouver un refuge et ainsi peut-être assurer un avenir à son enfant…Pour survivre, le père décide de faire passer Rag pour un garçon. Les cheveux de Rag à l’aube de l’adolescence, sont coupés courts, elle porte des casquettes et des survêtements amples. Son corps n’a pas encore commencé à se développer. Rag était un bébé quand la pandémie a anéanti la population féminine de la planète, y compris sa mère (Elisabeth Moss), donc cette vie est tout ce qu’elle connait.
Avec une infinie délicatesse, parvenant à illustrer de manière très tangible la menace qui pèse sur cette enfant qui ne peut compter que sur son père pour la protéger, Light of my life impose aussi une poésie de tous les instants et tant pis si parfois, en effet, Affleck cède un peu aux clichés tenaces du cinéma indépendant taillé pour Sundance.
Sa démarche est salutaire, rendue d’autant plus puissante, paradoxalement, par le contexte dans lequel elle s’inscrit. Si Casey Affleck ne pouvait prévoir que son film sortirait en plein pandémie, il faut reconnaître que son histoire nous touche avec une force qui n’aurait peut-être pas été la même dans d’autres circonstances.
Conte tragique et impitoyable articulé autour de la paternité, Light of my life réussit également à prendre la forme d’une ode à la fiction. Ce qui, pour le coup, est nettement plus inattendu et donc bienvenu. Il s’agit là d’une œuvre modeste et touchante, film post-apocalyptique qui, s’il n’a pas la puissance cinématographique des «Fils de l’homme» d’Alfonso Cuaron ou de «La Route» de John Hillcoat, compense par un cœur qui bat la chamade, celui d’un père prêt à tout pour sa fille.
Le film n’échappe pas à quelques tics du cinéma indépendant américain – longue scène d’exposition conçue comme un tour de force narratif, flashbacks explicatifs – mais Casey Affleck compose un personnage humain et vulnérable et révèle une jeune actrice promise à un grand avenir, Anna Pniowsky.
La jeune actrice apportant beaucoup au film, elle dont le personnage est le véritable centre du récit. Une fillette perdue dans un monde d’hommes, que l’on pense totalement dépendante des décisions et de la détermination de son père alors qu’au fond, c’est bien plus complexe que cela. Et c’est aussi là que réside la force de ce beau film : dans sa capacité à brillamment exploiter son histoire sans se montrer trop linéaire.
Dans la mesure, Casey Affleck, s’il est en effet parfois un peu écrasé par ses références, reste dans la maîtrise de son sujet. Y compris au niveau de la mise en scène, pleine de sensibilité, sobre mais aussi capable de faire preuve d’une ampleur appréciable. De quoi faire de Light of my life un film certes cruel mais aussi habité d’une beauté terrassante.
Light of my life parvient à faire résonner sa voix en s’imposant tel un conte cruel mais néanmoins habité d’une lumière tenace. Un film soigné, dans sa forme et son fond, exigeant, passionnant et poétique, qui reste longtemps en tête après la fin de la projection.